Journée de Lutte contre l’Agro-industrie – Rassemblement de Vannes 07/10/2023

Dossier de presse : Intervention d’Alain RIVAT (EELV), Intervention du RAFU, Intervention du Collectif Bretagne Contre les Fermes Usines

Intervention d’Alain RIVAT (EELV) :

Jusqu’à quand allons-nous considérer normal d’élever des animaux en les privant de la lumière du jour, en les entassant par milliers ou dizaines de milliers ?

Les conditions d’élevage intensif ne sont-elles pas tout simplement barbares ?

Le dénoncer, ce n’est pas dénigrer ceux qui y travaillent ou ceux qui transforment les animaux dans les abattoirs et usines de l’agroalimentaire, sacro-saint totem de l’emploi breton.

Dénoncer les fermes usines, c’est dénoncer un système et une quasi mafia comme en parle bien Nicolas Legendre dans son livre Silence dans les champs.

Dénoncer l’élevage intensif, c’est mettre en lumière l’évolution d’un modèle agricole hérité de l’après-guerre.

Il existe pourtant des solutions.

D’abord l’élevage à l’herbe, que le paysan André Pochon a défendu durant sa vie entière. Moins coûteux en énergie, en intrants, en main d’œuvre. Que des herbivores mangent de l’herbe n’est pourtant pas bien difficile à comprendre !

Dans les élevages laitiers, certains font évoluer leurs pratiques.

D’autres vont encore plus loin, mais évidemment, la productivité est moindre, et donc l’augmentation du coût de l’alimentation doit être acceptée.

Pour cela, il faut impérativement réorienter les aides de la PAC.

Il est aussi nécessaire d’assurer des débouchés aux producteurs. Autour des villes se mettent en place des ceintures maraîchères et il faut aller plus loin et soutenir les expérimentations de la Sécurité Sociale Alimentaire initiées notamment par la Confédération paysanne.

La sécurité sociale alimentaire sera un nouveau droit social qui permettra à toutes et tous de se nourrir d’aliments de qualité pour en finir avec la charité de l’aide alimentaire qui permet à la grande distribution d’écouler ses invendus en défiscalisant.

Nous gagnerons nos combats dans les champs, dans les luttes militantes et syndicales, mais nous ne les gagnerons pas sans des réponses politiques.

Intervention du RAFU :

Bonjour à tous et à toutes

La Coalition Nationale des Résistances aux fermes usines – la coalition RAFU – vous remercie grandement d’être réuni ici, comme dans 20 autres lieux en France, aujourd’hui pour demander un moratoire contre les fermes usines. Les hauts de France, la Normandie, la
nouvelle aquitaine, les pays de la Loire, Auvergne rhône alpes et la bretagne qui comptabilise 10 rassemblements sont mobilisés aujourd’hui. Je tiens à rappeler que nous nous attaquons au système fermes-usines et non aux agriculteurs, qui ne sont que des rouages d’un système bien huilé.

En ce moment, à l’assemblée nationale, nos députés discutent de la LOAA – la loi d’Orientation et d’avenir agricoles – un projet législatif qui vise à modifier la politique agricole française – afin de répondre à un double enjeu : le renouvellement des générations agricoles (d’ici 10 ans, la moitié des agriculteurs actuellement installé auront atteint l’âge de la retraite) ainsi que la transition écologique et l’adaptation aux enjeux climatiques. Les impacts du changement climatique sur l’agriculture sont déjà visibles et nombreux : baisse de la ressource en eau, variabilité du régime de précipitations, augmentation de la fréquence et des aléas climatiques, prolifération des maladies et des ravageurs, baisse des rendements, surchauffes mortelles dans les élevages clos. Les impacts de l’industrialisation sont particulièrement lourds : souffrance animale, pollutions des sols, de l’eau, de l’air, appauvrissement de la biodiversité, mise en danger de nos santés, désertifications rurales qui déstructurent le tissu social.

Nous dénonçons le modèle des fermes-usines, des usines à viandes, à légumes, à tomates – qui représentent l’optimisation ultime de cette agro-industrie en concentrant moyens, outils, produits et bénéfices pour quelques-uns. Ce sont des modèles de production hors-sol, affranchi de toutes contraintes d’environnement. Elles sont caractérisées par une rupture des liens avec le sol : ce sont des unités de production dont les matières premières n’ont plus de lien avec le sol, viennent de circuits d’importation dé-territorialisés, qui produisent des produits standardisés avec l’utilisation de traitements préventifs systématiques, des circuits de vente hors territoire, gérés par des groupes industriels et une gestion des déjections basée sur l’exportation hors territoire. Ce sont des systèmes de production massive pour un minimum d’emploi, piloté par des groupes industriels et des acteurs de la finance, et qui dépendent des financements publics. Les savoirs paysans disparaissent. Ce sont des systèmes de production massive qui considèrent le vivant comme un produit – sans considération aucune pour le bien-être animal. Ce sont des systèmes de production massive qui ont des
impacts environnementaux, climatiques et sanitaires. Emissions de CO2, rejets d’ammoniac (48.000 morts par an), de nitrates (algues vertes), de méthane, de pesticides, de fongicides, artificialisation des sols et des terres, épuisement des sols, pollution du littoral, émergence de zoonoses. Nous dénonçons aussi la dérive de ce système qui n’a plus pour objectif de nourrir les populations mais seulement de faire du profit, y compris en détournant les terres de leur vocation nourricière pour alimenter des méthaniseurs, activités plus juteuses.
C’est particulièrement important de se réunir en bretagne au vu de la si forte concentration de fermes-usines sur notre territoire et au vu de l’omerta qui existe ici. Nous sommes dans une région où des militants et des journalistes se font déboulonner leurs roues de voiture…

Le processus soit disant « démocratique » engagé autour de la LOAA nous laisse un goût amer. La démocratie n’est absolument pas la priorité du système agro-industriel. Consultation éclair des citoyens, instances verrouillées, organisations oubliées. Le pilotage des concertations régionales a été confié aux Chambres d’Agriculture, elles mêmes dirigées par un syndicat qui défend le productivisme. Le résultat ? La consultation publique a eu lieu en catimini et sans ambition. Les mesures de la convention citoyenne pour le climat n’ont pas été écouté. La coalition RAFU estime que la question de l’alimentation et de l’agriculture est une question politique qui nous concerne tous et toutes, et qui mérite un traitement démocratique. Comment écrire une véritable loi d’orientation agricole sans prendre réellement en compte toutes nos voix ? Où est la démocratie ?

Nous exigeons donc la mise en place d’un moratoire sur les fermes-usines, c’est-à-dire l’arrêt des autorisations d’extensions ou de créations de nouvelles fermes-usines tant que nous n’avons pas décidé collectivement de ce que nous voulons pour l’agriculture et notre alimentation. De quelle agriculture avons-nous besoin ? Quelle agriculture peut s’adapter au changement et venir nous nourrir tout en respectant le vivant, c’est-à-dire humain, animaux et milieu de vie dont nous dépendons et faisons partie ? Que voulons nous mettre dans nos assiettes ? ca nous regarde !

Pour débuter la « vraie enquête publique », je vous propose d’inscrire sur ces assiettes vos voeux pour l’agriculture et votre l’alimentation afin d’en faire une grande guirlande à remettre au préfet et d’inscrire sur des assiettes que nous poserons au sol tout ce dont vous ne voulez plus.

Aujourd’hui partout en France, des collectifs résistent et souhaitent l’obtention d’un moratoire. Face à cet objectif, nous devons converger et coordonner nos forces – des députés dans l’hémicycle, aux luttes paysannes, à la lutte dans la rue. Faisons-nous entendre – faisons un maximum de RAFU.

Intervention du Collectif Bretagne Contre les Fermes Usines

Je suis Romane du collectif Bretagne Contre les Fermes Usines.

Nous avons répondu à l’appel à mobilisation pour l’obtention d’un moratoire sur les fermes usines de la coalition RAFU en vous proposant un rendez-vous devant les préfectures bretonnes et en convoquant les préfets des préfectures du Morbihan, de l’Ile et Vilaine, du Finistère et des Cotes d’Armor.

En effet, les préfets ont la responsabilité, entre autres, de protéger les personnes, d’aménager le territoire, de veiller à la protection de l’environnement, de lutter contre la désertification, et de garantir l’exercice des libertés publiques. Il doit faire preuve de neutralité et de réserve dans ses décisions, et ils doivent travailler avec des parlementaires, des élus, des syndicats et des associations et groupements de citoyens. Nous estimons aujourd’hui que les préfets, en délivrant des autorisations d’extensions et de créations de nouvelles fermes-usines ne font pas correctement leur mission.

Monsieur le préfet, dois-je vous rappeler que l’extension et la création de fermes-usines dépendent de vous ? En effet les porteurs de projets doivent déposer, auprès de vous, des études d’impact environnemental et recevoir, de votre part, un avis favorable. Dans notre démocratie libérale, vos décisions reposent sur la confrontation d’avis éclairés, intelligibles et raisonnés. Or, beaucoup de ces études d’impact ne sont pas complètes. Beaucoup ne prennent pas en compte les effets cumulés des projets avec ceux d’autres installations existant déjà sur le territoire, les quantités d’azote émises dans l’air ne sont pas chiffrés, il n’y a pas d’étude d’acceptabilité du milieu existant, les ressources ne sont pas évaluées et il n’y a pas de programme de réduction de la consommation et de préservation des ressources. Les effets indirects ne sont pas non plus pris en compte alors qu’ils sont inscrits dans le code de l’environnement. Les cultures de Soja sont responsables en Amérique latine d’une partie de la déforestation. Cela est-il pris en compte dans votre décision ?

Comment les études d’impact peuvent-elles avoir autant de carences ? Comment les préfets peuvent-ils prendre des décisions respectueuses de la démocratie et de l’environnement face à de telles carences ? Comment veillez-vous à la préservation de l’environnement dans un tel contexte ? Mr le préfet, exigez des conditions de travail correctes ! Ou demandez un
moratoire, le temps qu’on décide collectivement pour ne plus vous laissez porter la responsabilité d’un système mortifère ! Dois-je vous rappeler qu’à Langoëlan par exemple, votre autorisation a été cassé par le tribunal administratif pour insuffisance de l’étude
d’impact dans son état initial et notamment en raison de l’absence d’inventaires naturalistes alors que le projet se trouvait en proximité d’une zone Natura 2000 et au sein d’une zone faisant l’objet d’un inventaire général de biodiversité & en raison de l’insuffisance de l’étude d’impact qui ne produit aucune donnée sur les effets d’émissions d’ammoniac sur les
populations et les milieux environnants.

Mr le préfet, en autorisant des extensions et la création de nouvelles fermes usines, vous mettez en danger la population alors que vous devez la protéger. La non prise en compte des effets cumulés a des effets mortifères – pollution à l’ammoniac – sur votre département la commune de Priziac est la 10ème commune la plus émettrice en ammoniac. Vous connaissez les particules fines ? Santé publique France chiffre la mortalité due aux particules fines à 48.000 décès par an. On sait que les particules fines sont produites par 3 activités humaines : le transport routier, le fioul et l’agriculture. Il y a trois ans lorsque nous étions tou.te.s confinés,
et que le temps était particulièrement clément, il ne restait plus qu’une source d’émission d’ammoniac : l’agriculture. Or, pendant cette période les niveaux de particules fines atteints dépassent les valeurs guide de l’OMS. Par rapport à une année sans confinement, les niveaux sont à 80% des niveaux atteints chaque année. On sait donc maintenant que ce sont les émissions d’ammoniac qui produisent très majoritairement les particules fines que nous respirons et qui sont un danger pour notre santé.
Dans le Morbihan, la commune de Bignan déclare 83,9 t/an, la commune de Caro 70,5 t/an, Priziac 58,7 T/an et Taupont 56,2 T/an et on ne parle là que des émissions déclarées par les élevages produisant plus de 10 T/an. A priziac ce sont trois élevages qui déclarent et 19 qui ne déclarent pas et vous voudriez autorisés des extensions ? Mais votre mission n’est il pas la préservation de la santé des individus ? Mr le préfet, nous estimons qu’à ce jour, vous ne faites pas des choix qui protègent la santé des habitant.es.

Vous ne protégez pas non plus la santé des habitants mr le préfet, lorsque vos choix favorisent l’accaparement de l’eau. Face au dérèglement climatique, nous devons anticiper les périodes de sécheresse. Et bien à Priziac, le bassin versant n’est pas interconnecté donc quand les porchers pompent dans la nappe, ils puisent bien dans la réserve destinée à l’alimentation
humaine… Pareil à Plaudren…

Mais Mr le préfet, la décision est-elle vraiment la vôtre ? Pouvez-vous vous opposer à des projets et conserver votre emploi ?

Nous ne voulons plus de cette agriculture mortifère, toxique et non respectueuse du bien être animal, pleine de produits chimiques, et émettant des tonnes de merde. L’urgence sociale est là, le métier d’agriculteur est difficile et fait de nombreuses victimes, l’urgence environnementale aussi. Nous devons agir.

Soyez à la hauteur de votre responsabilité mr le préfet. Exigez un moratoire démocratique, une « vraie enquête publique », mettez le moratoire en place, ne vous laissez plus manipuler par les lobbies, faites usages de la raison, soyez à la hauteur de la démocratie que nous appelons de nos voeux. Considérez les choses autrement.

Nous continuerons de lutter contre les fermes-usines, pour une agriculture paysanne vertueuse et territorialisée. Nous nous mobiliserons avec les députés au sein de l’assemblée, dans les champs en devenant paysans, dans la rue pour nous faire entendre, au sein d’assemblées citoyennes, mais nous ne lacherons pas nos exigences alimentaires, écologiques, démocratiques, sociales et de bien être animal. Nous n’avons pas le choix. Nous feront front et nous résisterons, par l’entraide , le commun et la démocratie